Collègue B2, B4, Vicks (elle est toujours grippée ces derniers temps) et moi avons repris aujourd’hui une discussion sur l’emploi particulièrement fréquent du futur périphrastique (ou futur proche) dans la langue orale et, par conséquent, de l’emploi littéraire du futur simple. Bon, on me dira peut-être qu’on a des sujets de conversation particulièrement nazes dans mon service, mais ça vaut bien, vous en conviendrez, les ennuyeuses discussions sur le temps, les vacances, la télé, le sexe et la coprophagie qui se tiennent régulièrement dans les ascenseurs des édifices du centre-ville.
« Ce futur périphrastique est un redoutable concurrent du futur simple dans la langue parlée : On a calculé qu’on l’employait une fois sur trois. » Voilà ce qu’affirme Grevisse dans Le bon usage. Le pauvre : il n’a jamais fait un tour au Québec, foi de quelqu’un qui ne sait de quoi il parle. Non mais, vous vous souvenez de la dernière fois où vous avez dit : « Je me ferai des tomates confites et deux œufs tournés saucisses demain », au lieu de : « Je vais me faire des tomates confites et deux œufs tournés saucisses demain »? Non? Me voilà réconforté. Bon, il y a tout de même collègue B4 qui prétend qu’on utilise le futur simple plus souvent qu’on ne le croit, mais je vais tout de même pas m’embarrasser des affirmations d’un linguiste qui sait de quoi il parle. C’est moi qui commande ici, je dis ce qui me met en valeur, je ne voudrais pas qu’on corrompe ma liberté d’expression, c’est la mode dans les blocs-notes. CQFD, basta et passez go.
Reprenons donc la démonstration. Toi, homme du peuple, et toi, femme du peuple, voulez impressionner la galerie, masquer votre statut social et faire bonne impression dans les soirées canapés (admirez la polysémie de l’expression)? Pensez futur simple et, dans le meilleur des cas, plus-que-parfait du subjonctif (que nous aborderons une autre fois). À cet égard, je vous présente des exemples vous aideront, j’en suis sûr, à devenir accroc du futur simple :
Ne dites plus :
- Je vais lire ce blogue rempli d’atermoiements amoureux.
- Je vais lui faire l'amour comme s’il n’y avait pas de lendemain.
- Il va la demander en mariage.
- Il va se faire prendre les culottes baissées.
Dites plutôt :
- Je lirai très bientôt le blogue typique.
- Je frapperai mon Waterloo.
- Il s’humiliera.
- Il rencontrera sa maîtresse.
Bon, je crois que vous comprenez le principe. Exercez-vous. N’hésitez pas à me faire part de vos découvertes.
Évidemment, je ne saurai trop vous faire prendre conscience de la polyvalence du futur dans le verbe français. Il faut en effet adjoindre au futur simple, au futur périphrastique et au futur antérieur (« J’aurai été un pédagogue extraordinaire. ») le futur proche sans semi-auxiliaire (« J’arrive à l’instant. ») et, en matière de nanas, le futur improbable (« Je t’appelle. »), le futur compliqué (« Je ne suis pas prête. »), le futur plaisant (« Je couche le premier soir. »), le futur sans sexe (« Je suis enceinte. ») et le futur anéanti (« Il faut qu’on se parle. »).
Qui a dit que le français était une langue compliquée, hein?
8 commentaires:
Tu me feras penser à te parler de mon fils qui, en matière d'impératif, utilise une forme avec auxiliaire assez amusante : va+infinitif.
N'utilise-t-on pas plus souvent le futur simple dans le cas d'une phrase négative ?
Ainsi on entendra : « Cet après-midi, je vais être (ou plutôt : j'v'ête) à la maison. Je ne (ne : ha ! ha ! ha ! on n'entend jamais « ne » !) serai pas au bureau ».
Cela aurait-il un lien avec l'emploi du subjonctif, également régi par l'emploi de la négation ? Par exemple : « Je crois qu'il est à la maison. Je ne crois pas qu'il soit au bureau ».
(J'adore vos conversations de bureau !)
Jfbourg c'est B2, en passant, mais ton site est tellement blindé contre les spams que j'ai dû user de cette vieille identité.
Jfbourg : Il ne faudrait surtout pas oublier la forme surcomposée « va donc + infinitir ».
Mo : En effet, nous en sommes venus à la conclusion que le futur simple semble davantage employé dans la phrase négative. À cet égard, je soupçonne B2 de t'avoir parlé hier soir de ladite conversation.
Selon ma première idée, c'est simplement par souci d'économie du langage (« je vas pas être » étant plutôt lourd et non harmonieux par rapport à « je serai pas »). Mais comme dans le cas du subjonctif, l'emploi du futur simple semble régi par la tournure négative. En effet, comme le souligne Grevisse, le futur périphrastique « marque souvent un futur proche, parfois aussi un futur relativement lointain mais considéré comme inéluctable » (mes italiques).
Une interrogation persiste : qu’advient-il si le verbe aller du futur périphrastique est utilisé au futur simple? Fourvoierait-ce trop les gens? Le futur proche, curieusement, semble moins simple.
Essaie, tu iras voir…
Sinon, je t’appuierai volontiers lorsque tu fonderas ta société à but non lucratif pour la survie du plus-que-parfait du subjonctif. J’ai toujours aimé les conjugaisons en voie d’extinction.
Puis en passant, le futur compliqué ne prend pas seulement la forme de « Je ne suis pas prête. »; « Nous sommes prêts! » s’est déjà révélé très problématique.
Je suis insultée ! Comme si je ne pouvais pas arriver à ces conclusions par moi-même ! Pff !
Heille ! On a des enfants ! On ne parle pas de grammaire à table !
On ne parle pas pantoute !
Je boude ce site pour 24 heures.
François : Pour compliquer les choses, qu'arrive-t-il si on coordonne un semi-auxiliaire au présent et un autre au futur? Tu vas voir ce que tu iras voir...
Société à but non lucratif? J'aime bien l'oxymore de l'expression. Quoi qu'il en soit, je t'aviserai de la fondation dudit OSBL, nommé Que j'eusse su.
Mo : Insultée pour si peu? Je n'arrive toujours pas à comprendre comment t'en arrives à la conclusion que je suis arrivé à la conclusion que tu ne pouvais pas en arriver à une telle conclusion. Allez, on fait la paix, et je paie la bière la prochaine fois.
Zut Benoit, je te laisse toujours des super commentaires hallucinant de futur simple et ... zap. Ça ne se rend pas.
J'allions pleurer un coup, tiens.
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